(parce que oui, je suis actuellement obsédée par la chanson broken crown de mumford & sons)
I will not speak of your sins || L’enfant est assise sur le canapé. Elle attend, comme on le lui a demandé. Habillée de sa robe rouge, elle balance ses pieds nus nerveusement sans vraiment savoir pourquoi. Sans doute était-ce à cause de ce silence pesant, ou de ce long corridor dont le fond était plongé dans le noir ? Cet endroit lui faisait peur, mais elle n’avait pas osé le dire, angoissée à l’idée de décevoir son père. C’est un aspect qu’il apprécie chez elle, ce côté docile qu’elle a, elle n’a pas besoin d’être toujours surveillée. Elle ne pose pas de problèmes, elle n’en pose jamais.
« —
Naomh ? » Une voix fluette l’appelle, celle d’un petit garçon à peine plus âgé qu’elle. Roman apparait au coin du couloir, encore habillé de son pyjamas ligné blanc et bleu. Les cheveux blond en bataille, les yeux voilé par le sommeil, il semble subitement s’éveillé à la vue de l’enfant. «
Depuis quand es-tu là ? » chuchote-t-il, conscient qu’il est censé dormir à cette heure avancée de la nuit. Le garçon court jusqu’elle et s’installe à ses côtés, attrape la main de la petite fille et lui offre son plus beau sourire. Ses pieds arrêtent de se balancer et restent suspendu au-dessus du sol qu’elle n’atteint pas. « —
Yann est mort. Papa ne voulait pas que je le sache mais David me l’a dit, et il ne voulait pas non plus que je reste seule alors je suis venue avec lui. Il m’a dit de l’attendre, je suis désolée mais je dois rester ici. » Elle esquisse un petit sourire gêné auquel Roman répond par un rire, son sourire ne cesse de grandir tandis qu’il serre son emprise sur la main de la petite fille. « —
Je sais pour Yann. » L’enfant se rapproche de Naomh et apporte sa bouche jusque son oreille. «
Père m’a dit de le tuer durant la pleine lune, hier. Il m’y a aidé, évidemment, mais j’ai pu l’achever quand il était par terre. Quand il était en train de mourir. Mais plus tard, je serai plus fort, et je pourrai tuer tout les traitres ! »
Naomh s’échappe de son emprise, elle crie. Roman, lui, rit. Un rire fou, un rire de fou. La colère l’envahit, cette haine envers cet être placée à une place qui ne lui revient pas. Elle devait mourir, elle aurait été la prochaine de toute façon. Il était temps que le clan retrouve sa gloire passée, et cela devait commencer par l’éradication des plus faibles, son père attendait beaucoup du garçon. Il devait être à la hauteur. Il tente de la rattraper alors qu’elle court pour atteindre l’étage. Pour atteindre son père. L’enfant, agité, se transforme sous sa forme lupine et lui saute dessus toutes griffes sorties. Le corps frêle de l’enfant est secoué, sa main s’agite sur la première marche de pierre, elle frappe. Puis, elle s’évanouit.
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Cause when I open my body I breathe a lie || Des sanglots brisent le silence. Au coin de la pièce, une silhouette recroquevillée sur elle-même pleure. Elle ne semble être capable de bouger mais son corps est pris de sursaut de temps à autre. À l’entrée, Naomh regarde ce spectacle. L’enfant est elle aussi incapable de bouger, elle ne devrait pas être là et elle le sait, mais elle reste. Depuis son attaque, deux années auparavant, elle s’était montrée plus… sauvage, comme le disait ses proches. Personne ne s’inquiétait vraiment pour elle, mais ils s’avaient qu’elle ne s’était jamais vraiment remise de son agression, ses cicatrices le lui rappelant. Elle semblait plus distante depuis, plus mordante aussi, mais elle se doit d’être forte pour la meute, pour ne pas condamner son père. Quelque chose s’était éteint en elle pour qu’une autre s’allumer, elle n’avait jamais demandé de cette vie.
« —
Vous allez bien ? » lâche la petite fille, réellement inquiète. La silhouette s’immobilise un instant, comme surprise en plein acte honteux puis relève doucement la tête. Pas un bruit ne vient les perturber à l’exception de sa respiration saccadée, mais elle sait que cela ne durerait pas. Ce n’était jamais le cas. Dans le couloir, une porte claque et une voix beugle. Naomh est violemment tirée en arrière avant même d’avoir pu protester et de nouveau, la silhouette pleure. «
Mais je l’aimais bien ! » proteste l’enfant. Elle ne comprend pas ce qu’elle a fait de mal. Rapidement, des cris arrivent jusqu’à elle. Naomh baisse la tête, honteuse, en chercher à ne plus l’entendre. « —
Tout va bien se passer. » répète son père, mais c’est un mensonge. Elle le sait.
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So crawl on my belly 'til the sun goes down || « —
Rends-moi la fille, Roman. » La voix de John résonne dans la pièce, forte et puissante. Les lèvres retroussées, le visage grave, un faible grognement s’échappe des lèvres de l’homme. Il va se transformer, il le sait. Ils le savent, eux aussi. Face à lui, deux hommes. L’alpha ne les connaissait que trop bien. Un sourire narquois peint sur chacun de ces visages, le regarde allumé par la même lueur de défi. L’un d’entre eux pue
la mort. « —
Oh, John. Tu ne vas quand même pas te transformer ! Je te l’assure, j’ai été un excellent hôte. Elle est saine et sauve, mon ami n’y a même pas touché. Je te le promets. » Son ton est moqueur, l’homme tente de le faire craquer et pour l’accompagner, son acolyte ris à gorge déployée. Ce n’est qu’une mauvaise blague pour eux, ils ne prennent pas ça au sérieux. Ils ne prenaient jamais rien aux sérieux. C’était un jeu, voir jusqu’où ils pourraient aller avec les loups. « —
Où est-elle ?! » beugle John. «
Qu’est-ce que tu penses faire, Roman ? N’as-tu donc pas compris la leçon ?! Souhaites-tu à ces points diriger cette meute ? La mort de son père aurait du suffire mais visiblement, j’aurai du te tuer avec. Tu n’es qu’un gamin qui rêve d’une gloire qui mènera à ta perte. » Un gosse, qui venait à peine d’atteindre la majorité et qui espérait se hisser au sommet rapidement, mais s’associer à
ça ? John ne comprend pas, il ne peut accepter l’idée qu’il puisse s’associer avec un chasseur. Ses membres menacent de céder sous la détresse de la revoir vivante, sous l’adrénaline qui pompe dans ses veines. Bon sang, il peut la sentir. Elle est ici, il le sait. Mais où ? Il grogne, il se fait menaçant. Il le sait, il leur faire peur, il le lis sur leurs visages qui se veulent moqueurs. Ils sont pathétiques, et ils vont mourir. « —
Sais-tu seulement à qui tu t’en prends, l’agneau ? » Son ton est plus doux, mais il reste tout aussi agressif. Bien sûr que non, il ne le sait pas. Tout deux plus stupides l’un que l’autre. Le chasseur vient probablement de sortir des jupons de sa mère et espère pouvoir d’abord tromper Roman pour se débarrasser ensuite de la meute entière, si naïf. Il ne doit probablement encore rien connaitre de ce monde, encore moins de cette lignée de loups-garous, aussi puissante que vieille, bien connue en ville. Ce n’était sûrement pas cette
poupée de chiffon et ce
louveteau qui allaient les menacer, ce n’était jamais arrivé jusque là et jamais John n’allait laisser passer ça.
« —
Je…
Je peux partir maintenant ? » Une voix timide s’élève, faible. Une silhouette se meut dans la pièce adjacente et presqu’aussitôt après un corps d’adolescent se détache de l’ombre lorsque la porte séparant les deux pièces. Sa veste rouge, fermée jusqu’au cou, n’empêche pas ses membres de trembler sous la morsures du froid. «
John ? » appelle-t-elle, la voix rauque. Elle a faim, elle a soif, elle est fatiguée. Elle ne comprend ce ils veulent et en réalité, elle ne veux pas savoir. Elle veut juste que ça se finisse. Son père la regarda, les yeux exorbités. Elle n’est pas effrayée, pas même alarmée. Juste… lasse. «
Ils ne prennent plus la peine de m’attacher maintenant. » dit-t-elle avec un petit rire qui se veut rassurant, mais qui ne l’est pas. Nonchalamment, elle se dégourdit les jambes auparavant repliées sous son corps et se déplace d’un pas lent vers John. « —
Naomh, comment vas-tu ? » Son regard trahissait l’inquiétude qui bouffe John qui, avec une tendresse paternelle, encadre le visage de l’adolescente de ses mains. L’homme s’était tellement focalisé sur sa rage qu’il avait presque fini par l’oublier, tandis qu’elle attendait d’être secourue, assise sur cette cage. « —
Je… » Sa voix se tait, son regard se perd dans le vide. «
Ça va. » Même elle, elle n’y croit pas. Un sourire éclatant illumine le visage de Roman, alors que son compagnon s’était éclipsé. « —
J’ai été heureux de te revoir, Naomh. »
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I knew my weakness || « —
Tu dois regarder. Assume tes actes. » lui murmure John. «
Tu te dois d’être forte, ou je ne pourrai… »
Ou il ne pourra la garder. Elle le sait. L’adolescente est de retour devant le hangar, celui dans lequel elle avait été enlevée quelques mois auparavant. À ses cotés, son père et les autres membres de sa meute la regardent. C’est le jour où elle doit faire ses preuves. C’est le jour où elle doit se montrer forte, se montrer digne. L’adolescente a beau être humaine, le monde dans lequel elle vit est
cruel. Son père est cruel. Elle ne sera pas comme eux, jamais. John se refuse de la transformer et elle se refuse toute simplement à eux. C’est un monstre, ils sont tous des monstres. Noamh ne veut pas qu’il la garde auprès de lui, elle ne veut pas être avec l’un d’entre eux. Non, elle veut partir. Loin de lui. Loin de ces
animaux. Les doutes avaient été émis quant à sa place auprès de John, lui, furieux les avaient balayé d’un revers de la main, en avait faire taire certains mais toujours plus de voix s’élevaient contre lui. La meute ne pouvait se permettre d’être ainsi exposée à cause d’elle. À cause d’une humaine, d'un bambin trouvé dans la rue.
Elle ferme les yeux, forts. Elle ne voit plus les flammes dévorant la structure de l’entrepôt, elle n’entend plus le hurlement, elle ne sent plus l’odeur de la chaire brulée. Elle sait parfaitement que si l’homme s’en sort, elle devra le regarder mourir probablement bouffé par les animaux qui l’entouraient. Roman s’en est sortit, puis a disparu. Il attend son heure.
Naomh a seize ans. Naomh n’est plus une enfant.
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I'll never wear your broken crown || « —
Je n’ai jamais rien demandé ! Tu aurais très bien pu m’abandonné à un orphelinat lorsque tu m’as trouvée, ça m’aurait peut-être évité cette vie de prisonnière. » La gifle part. Lorsque la main quitte sa joue, une trace rouge a déjà pris place. Naomh regarde John, horrifiée. Lui-même la regarde, furieux, désolé.
Détruit. Elle a raison. Elle tente de partir, mais la main de l’homme l’attrape fermement. Il la retourne violemment, il veut dire quelque chose mais rien ne sort de sa bouche. Ils se regardent, ils se défient du regard. Pas un mot ne sort, seules les respirations erratiques font écho dans la pièce. «
Naomh… » Elle lui retourne une claque, de toute sa force. L’alpha l’avait vu venir, mais il a choisit de ne rien faire. Il ne la sent même pas. Comment avait-il pu en arriver là ? Qu’auraient fait les vrais parents de Naomh ? Il ne sait pas, il ne sait plus. L’alpha l’a
déjà perdue. Il ne peut plus rien faire, c’est une adulte maintenant et il avait toujours su qu’elle partirait, mais il n’avait jamais cru que ça se passerait. « —
Tu ne peux pas juste… m’isoler de tout le monde et encore espérer que je demeure à tes côtés ! J’ai failli aller en prison pour toi, merde ! Tu m’as tuée, et tu me tues chaque jour un peu plus. » Des larmes perlent, puis coulent. Elle l’avait cru pendant tant de temps, naïvement. Elle avait pris la responsabilité de la mort de cette innocente, de son amie que l’un d’entre eux avait tué. Ce qu’elle pouvait être bête, elle était toujours restée la gamine qu’elle était trois ans auparavant, celle qu’elle pensait être disparue avec ces hommes dans le hangar. Le silence s’installe. «
Je pars. » finit-elle par dire.
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I took the road and I fucked it all away || Les images des reportages à la télévision défilent sans que Naomh n’y prête attention. La tête appuyée contre l’accoudoir du canapé, la jeune femme essaie de dormir, mais le sommeil ne vient pas. Les évènements de ces derniers jours ne cesse de la réveiller la nuit, les rares fois où elle arrive encore à dormir, et ce sont toujours les mêmes images qui défilent, elle n’arrive plus à ne pas voir le corps démembré de John. Elle avait décidé de tout quitter pour que justement cela n’arrive pas, mais elle n’avait rien empêché du tout. Au contraire, les rares fidèles à son père lui avaient répété qu’elle l’avait tué le jour où elle l’avait quitté. Tout était de
sa faute.
Lentement, sa main tâtonne le sol à la rechercher de sa bouteille d’alcool. Elle en a déjà trop bu, mais elle ne veut pas s’arrêter. La peur fait maintenant partie intégrante de sa vie, c’est l’unique sentiment que Naomh ressentait depuis des mois. Elle voulait partir, mais pour aller où ? La Nouvelle-Orléans avait été son foyer depuis son plus jeune âge, mais si elle restait… Naomh sait qu’elle ne pourra survivre. Son histoire ici était finie, tout comme celle de Roman. C’était lui qui avait provoqué la mort de son père mais ironiquement, il ne devint pas l’Alpha de la meute et fini par mourir de façon encore inexpliquée par les autorités qui avaient retrouvé son cadavre, mort avant son règne. Le pauvre enfant gâté avait été devancé. Mais cela n’avait rien changé, les autres loups étaient toujours aussi hostiles avec elle. Elle n’a plus personne.
La lumière du salon s’allume. Naomh, éblouie, grogne de mécontentement alors que se renverse sur le tapis le reste de boisson. Des pas arrivent jusqu’à elle et des paroles s’élèvent, mais la jeune femme est incapable de comprendre ce qu’on lui dit, elle n’en a pas envie. Elle se replie sur elle et espère que l’intrus finira par partir, mais à la place, elle sent des mains sous son corps et être soulevée.
« —
Comment t’es rentrée ? J’étais certain d’avoir fermé à clé. » grogne une voix dans son oreille. Semblant avoir un élan de lucidité, Naomh convulse sur le lit en essayant de se relever mais des mains la repousse sur le matelas. « —
Oh, c’est vrai. » murmure-t-elle pour elle-même. «
J’ai forcé ta porte pour pouvoir rentrer. Désolé, Adam. » Un mince sourire éclaire son visage. «
Mais c’est pas moi, hein. C’était ouvert. » continue-t-elle avant de rire, ivre. Puis, finalement, le sommeil l’emporte.
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I'll be home, safe and tucked away || Confortablement installée sur le siège passager, Naomh voit les paysages défilés. Elle quitte la Nouvelle-Orléans, enfin. Elle s’était rendue plus depuis longtemps que rien ne la retenait à la ville qui l’avait vu grandir mais elle ne s’était jamais résolue à faire le pas, du moins, jusqu’à maintenant.
« —
Prête à vivre seule ? » Tirée de ses pensées, la jeune femme regarde son ami. Elle est heureuse de partir, c’est un nouveau début pour elle. Une chance de tout commencer, de faire quelque chose de bien. « —
J’en ai aucune idée. Je m’étais habituée à toi, et je vais devoir commencer à me faire à manger seule. » Tout deux éclates de rire, le coeur lourd par la fin du voyage qui se profil et la séparation qui suivra. « —
Tu veux dire que tu t'es habituée à squatter mon appartement, que je sois là ou non, n'est-ce pas ? Je t’avoue que j’ai cru pendant un moment que tu étais une junkie et j’ai même pensé à faire poser une porte blindée pour que tu ne puisse plus rentrer chez moi. » La brunette lui sourit, puis reporte son attention sur la route. Weird Falls se dessine devant eux et Naomh, impatiente, sautille sur son siège. « —
Je reviens sur ce que j’ai dis, je suis carrément prête. »
(pour le coup, c'est du tout ce que je voulais faire de base, je suis frustration, mais les sciences m'ont menés à ma perte. et je le vis bien, c'est probablement ça le pire. j'espère quand même que ça plaira ♥.)