La petite fille s’asseya sur un fauteuil si moelleux qu'elle s'enfonçait légèrement lorsque son dos toucha l'extrémité du meuble. Confortablement installée, elle attendit tranquillement, regardant tout autour d'elle, détaillant chaque recoin de la petite pièce dans laquelle elle était entrée un instant plus tôt, seule. Sa mère l'avait laissé là, lui disant de rester sage en attendant l'arrivée d'un homme qui s'occuperait d'elle. Qu'est-ce qu'elle faisait là? Elle ne le savait pas vraiment, mais son instinct lui disait qu'elle le saurait bientôt...

Et en effet, à peine dix ou vingt minutes plus tard, un homme à la calvitie précoce, les cheveux restant, d'un brun presque noir et de petites lunettes rondes jonchées sur le sol entra en ouvrant brusquement la porte. La gamine sursauta, mais très vite se calma: l'inconnu lui souriait gentillement, la rassurant par la même occasion. Ce dernier s'asseya en face de la fillette et posa un grand carnet de feuilles blanches sur son bureau. Il remua ses crayons, tripota ses cahiers puis enfin, s'intéressa à Ayla, toujours silencieuse.

" Bonjour Ayla. J'imagine que tu ne sais pas ce que tu fais ici... " lui demanda-t-il calmement. " J'aimerai que tu me racontes un instant de ta vie, tu vois, pour... te soulager en quelque sorte, pour, disons, enlever ses souvenirs désagréables que tu gardes au plus profond de toi. " continua-t-il.

Ayla le regarda, interdite.

" Je suis psychologue, je peux tout entendre ! " le rassura-t-elle.

Elle ne savait pas pourquoi, mais elle voulait parler. Ces souvenirs enfouis au plus profond d'elle-même n'attendait que ça pour sortir. Pour couler pour ne plus jamais revenir. C'est ce qu'elle attendait. C'est ce qu'elle voulait. Alors elle se lança, et ne s'arrêta pas pour attendre que le psychologue l'interrompre: ses paroles s'écoulaient comme un torrent d'eau rapide et puissant.


" Je m'appelle Ayla Trepe. Et contrairement à ce que vous pensez sans doute, monsieur, ce nom n'est pas le mien, disons plutôt que ce n'est pas mon vrai nom... Il appartient à la femme qui m'a recueillie après que mes parents aient été tué par un monstre, juste sous mes yeux alors que j'étais cachée à la maison, discrète et silencieuse. Je ne pense pas qu'il m'ait vu... En revanche, moi, je sais qui il est !

Pour en revenir à la femme qui m'a recueillie -ma mère, ne pensez surtout pas que je ne l'aime pas: elle a été extrêmement gentille avec moi lorsqu'elle m'a retrouvé, errante sans but dans la ville où j'habitais avant. Elle m'a dit qu'elle passait par-là, pour une promos pour un de ses livres (elle est écrivaine) et qu'elle avait entendu parler de mon histoire... enfin, celle de mes parents... Elle avait donc entreprit de me retrouver. Nous avons par la suite beaucoup parler, elle, me demandant comment j'allais, si je tenais le choc et toutes ses autres questions que déjà plusieurs adultes m'avaient posé, et moi, lui répondant sans vraiment y réfléchir. Qu'est-ce que je pouvais bien lui dire? J'avais 9 ans lorsque cet accident a eut lieu...
Je ne réalisais pas vraiment à ce moment là ce qui c'était passé...

Finalement, nous nous sommes liées d'amitié et elle à décider de m'adopter. J'étais bien sûr, très surprise, mais également extrêmement contente: mes parents venaient de mourir atrocement, et une personne se décidait enfin à m'aider parmi toutes les autres qui ne s'intéressait pas à moi... Je lui sautais dans les bras, exprimant malgré moi la joie qui m'avait été enlevée lors de cet accident tragique.
Et c'est comme ça que Penelope Trepe est devenu ma mère.

Elle m'a emmené dans sa ville, cette ville: Weird Falls, et elle m'a expliqué tout ce que je devais savoir sur les Garous: créatures surnaturelles comme les humains les appellent. Loup-garous, coyote-garous, renard-garous, vampires et tant d'autres. Je ne me doutais absolument pas que de telles.... personnes pouvaient exister. C'est incroyable. Elles sortent tout droit des contes pour enfants, des légendes que l'ont nous racontait lorsqu'on n'était plus jeune... Je n'en croyais pas mes oreilles...

J'en déduisis bien vite que l'homme qui avait tué mes parents faisait partit de ces monstres mythologiques. J'en mettrais ma main à couper. Alors pour me venger, j'ai décider de devenir chasseuse, pour retrouver cet homme dont le nom m'est inconnu. Je connais cependant son visage, et ça va sans doute m'aider ! "



La fillette se tut bien vite, ne voulant continuer davantage. La feuille du psychologue était désormais remplie d'encre noire, gribouillis indéchiffrables compréhensibles seulement par celui qui tenait le crayon. Il la regarda, lui souriant gentillement avant de refermer son carnet et de le ranger sous scellé, dans un casier fermer d'un gros cadenas.

" Tous les dires de mes clients sont conservés là-dedans. Ne t'inquiètes pas, ton récit est bien gardé... " la rassura-t-il.

Puis il raccompagna la gamine à la porte où sa mère l'attendait.

" A bientôt, Ayla. "